La CJUE autorise le travail pendant 12 jours consécutifs !

Question de Mme Joëlle Mélin

L’article 5 de la directive 2003/88 du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail dispose que «tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de sept jours, d’une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures auxquelles s’ajoutent les onze heures de repos journalier».

Or, dans un arrêt du 9 novembre 2017 (C-306/16), la Cour de justice de l’Union européenne est venue interpréter ledit article, en affirmant que le moment où l’employeur est tenu d’accorder la période minimale de repos n’est pas précisé par la directive. Elle estime ainsi que la législation, qui ne permet pas de pouvoir bénéficier d’une période de repos au plus tard le septième jour qui suit les six jours consécutifs de travail, est conforme à la législation européenne. À cette occasion, elle valide une législation qui prévoit une période de repos uniquement après 12 jours de travail consécutifs!

Aussi, nous souhaitons savoir si la Commission entend se saisir de cette difficulté afin d’entériner le principe d’un droit au repos au-delà d’une période de 6 jours de travail consécutifs.

Réponse donnée par Mme Thyssen au nom de la Commission

La Cour, dans son arrêt dans l’affaire C-306/16, a interprété l’article 5 de la directive sur le temps de travail donnant droit à tout travailleur, au cours de chaque période de sept jours, à une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures auxquelles s’ajoutent les onze heures de repos journalier.

Dans cet arrêt, la Cour a considéré que la période de repos hebdomadaire ne doit pas nécessairement être accordée le jour qui suit une période de six jours de travail consécutifs. Au contraire, elle conclut que la directive confère une certaine latitude aux États membres quant au choix de ce moment.

Cette approche a également servi de base à l’interprétation de cette disposition par la Commission dans sa communication interprétative relative à la directive sur le temps de travail. En effet, conformément à sa base juridique, la directive sur le temps de travail n’impose pas un droit du travail uniforme dans l’ensemble de l’UE mais ne fait que fixer des prescriptions minimales en matière de santé et de sécurité pour l’aménagement du temps de travail, lesquelles doivent être transposées en droit national par les États membres.

Par conséquent, la directive n’empêche pas les États membres de fixer des dispositions plus protectrices pour la sécurité et la santé des travailleurs, y compris en imposant que ces derniers bénéficient d’un droit à une période de repos hebdomadaire dans des périodes de référence plus courtes que celles énoncées dans la directive.

La nécessité de mieux faire respecter et mettre en œuvre l’acquis existant a été un thème récurrent de la consultation sur le socle européen des droits sociaux, et la Commission a décidé en avril 2017 d’adopter une approche non législative pour assurer une meilleure application de la directive sur le temps de travail. Elle poursuit ses efforts pour améliorer l’application de la directive dans les États membres. Si la Commission décidait de procéder à une révision à cet égard, elle ne manquerait pas de prendre en considération la jurisprudence de la Cour dans ses réflexions.