Question du Dr Joëlle MÉLIN

La piètre qualité nutritionnelle de nombreux aliments industriels est l’une des principales causes de l’augmentation de l’obésité et du diabète, entre autres.

Pour autant, la complexité des données réglementaires européennes inscrites sur les emballages conduit à ce que plus de 80 % des consommateurs n’arrivent pas à les interpréter.

Si un «Nutri-score» a été mis en place en France, celui-ci est trop réducteur, d’une part car il repose sur des recommandations nutritionnelles discutables et en constante évolution, et d’autre part car il ne prend en compte ni les additifs, ni le caractère ultra-transformé du produit, dont les études démontrent pourtant que les répercussions sur la santé sont néfastes. C’est ainsi que les «céréales» ultra-transformées pour enfants sont notées B, C ou D, alors que les méfaits de leur consommation ont été démontrés, quand l’huile d’olive est notée E, alors même qu’il s’agit d’un produit brut dont la consommation ne pose pas de problème.

Seule la classification NOVA, reconnue comme un outil légitime par l’Organisation mondiale de la santé, classe les aliments selon leur degré de transformation.

Aussi souhaitons-nous savoir si la Commission européenne envisage de s’inspirer de ce classement et de l’améliorer afin de le rendre obligatoire sur les produits alimentaires vendus en Europe.

Réponse donnée par Mme. Kyriakides au nom de la Commission

Le règlement (UE) nº 1169/2011[1] dispose que les denrées alimentaires préemballées doivent comporter une déclaration nutritionnelle obligatoire. En outre, certains éléments de cette déclaration peuvent être répétés lorsqu’ils se trouvent dans la partie principale du champ visuel (sur la face avant de l’emballage). Des informations supplémentaires concernant les propriétés nutritionnelles d’une denrée alimentaire peuvent être fournies à titre volontaire tant qu’elles satisfont aux exigences des règlements (UE) nº 1169/2011 et (CE) nº 1924/2006[2].

Le «Nutri-score» est un logo nutritionnel facultatif destiné aux denrées alimentaires. Les projets d’actes juridiques notifiés par la France et la Belgique en ce qui concerne le «Nutri-score» décrivent les méthodes de calcul du score nutritionnel des denrées alimentaires à partir de leur composition nutritionnelle, à savoir la teneur de certains nutriments dans les aliments (graisses saturées, sucres, sodium, fibres ou protéines), la valeur énergétique et la présence de certains ingrédients (fruits et légumes, légumineuses et fruits à coques). Les denrées alimentaires sont réparties en cinq catégories sur la base de ce score.

Le système de classification alimentaire NOVA[3] classe les denrées alimentaires en quatre groupes[4] selon l’ampleur et l’objectif de la transformation des produits, plutôt que selon leur teneur en substances nutritives. La Commission n’a pas connaissance du fait que la classification NOVA a été utilisée au sein de l’UE afin d’informer les consommateurs des caractéristiques spécifiques d’une denrée alimentaire, telles que le degré de transformation du produit.

Dans la stratégie «De la ferme à la table», qui sera présentée au printemps 2020 dans le contexte du pacte vert pour l’Europe[5], la Commission examinera de nouvelles façons de mieux informer les consommateurs sur des aspects spécifiques, tels que la valeur nutritionnelle des denrées alimentaires.

[1] Règlement (UE) nº 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires (JO L 304 du 22.11.2011, p. 18).

[2] Règlement (CE) nº 1924/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires (JO L 404 du 30.12.2006, p. 9.)

[3] Conçu par les chercheurs de l’Université de Sao Paulo, Brésil [Monteiro, C.A., Levy, R.B., Claro, R.M., Castro, I.R.R. & Cannon, G. 2010. A new classification of foods based on the extent and purpose of food processing (Une nouvelle classification des denrées alimentaires selon l’ampleur et l’objectif de la transformation de ces produits). Cadernos de Saúde Pública, 26(11):2039-2049].

[4] Aliments non transformés ou peu transformés (comme les fruits et le lait), ingrédients culinaires transformés (comme l’huile végétale et le sucre), aliments transformés (généralement composés de deux ou trois ingrédients, comme les légumes en boîte, les fromages et le pain fraîchement préparé), produits alimentaires ultra-transformés (comme les plats préemballés surgelés), tels que décrits dans Monteiro CA, Cannon G, Moubarac JC et al. 2017a. The UN Decade of Nutrition, the NOVA food classification and the trouble with ultra-processing. (La Décennie des Nations Unies pour la nutrition, la classification alimentaire NOVA et le problème de l’ultra-transformation) Public Health Nutrition, 21, 5-17.

[5] https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr.

MON COMMENTAIRE SUITE A LA RÉPONSE DE LA COMMISSION :

« Par sa réponse, la Commission confirme qu’elle envisage d’informer les consommateurs uniquement sous le prisme de la valeur nutritionnelle des aliments rejetant ainsi l’idée d’une classification sous l’angle du degré de transformation d’un produit. Une fois encore, l’Union européenne démontre qu’elle est systématiquement en retard sur les bonnes pratiques. Alors que la stratégie « de la ferme à la table » nourrissait l’espoir d’une prise de conscience en la matière et aurait dû porter un tel projet, la Commission va, une nouvelle fois, faire le jeu de l’industrie agro-alimentaire en se concentrant sur les valeurs nutritionnelles ne permettant pas de distinguer les produits non transformés des produits ultra-transformés. Circulez, il n’y a rien à voir. »