Question du Dr Joëlle MÉLIN

Depuis la mise en place de dispositifs d’octroi de prêts garantis par différents États d’Europe, les demandes affluent, mais des difficultés limitent l’efficacité desdits dispositifs. En France, certaines banques refusent des demandes de prêts en raison de la définition européenne de l’entreprise en difficulté. En effet, la Commission européenne a indiqué dans le cadre temporaire sur les aides d’État du 19 mars 2020 qu’une entreprise qui, au 31 décembre 2019, se trouvait en difficulté au sens de la définition donnée par le règlement (UE) no 651/2014 ne peut pas recevoir d’aide au titre des dispositifs d’urgence.

Or, de nombreuses entreprises en expansion et dans une dynamique de développement et de rentabilité croissante ont pourtant des fonds propres inférieurs à la moitié du capital social, voire négatifs. Elles se trouvent donc exclues des dispositifs d’aides mis en place par certains États. De la même manière, certaines entreprises se trouvent dans cette situation pour des raisons indépendantes de leur volonté liées notamment aux situations de grèves et de terrorisme ayant fortement affecté leur trésorerie.

Aussi souhaitons-nous savoir si la Commission européenne entend s’attaquer d’urgence à cette difficulté afin de suspendre ou de modifier cette définition et permettre ainsi le sauvetage d’entreprises rentables.

Réponse donnée par par Mme Vestager au nom de la Commission

Les règles en matière d’aides d’État permettent aux États membres de prendre des mesures rapides et efficaces pour aider les citoyens et les entreprises qui sont confrontés à des difficultés économiques en raison de la pandémie de COVID‑19. 

Premièrement, l’objectif principal de l’encadrement temporaire est de fournir un soutien ciblé à des entreprises viables par ailleurs qui ont commencé à connaître des difficultés financières à la suite de la pandémie de coronavirus. Par conséquent, les entreprises qui étaient déjà en difficulté avant le 31 décembre 2019 ne sont pas admissibles au bénéfice de l’aide au titre de l’encadrement temporaire, mais peuvent bénéficier d’une aide dans le cadre des règles applicables aux aides d’État, en particulier les lignes directrices concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté. Ces lignes directrices fixent des conditions claires, selon lesquelles ces entreprises doivent définir des plans de restructuration solides leur permettant d’arriver à une viabilité à long terme.

Toutefois, les micro et petites entreprises ont été particulièrement touchées par la pénurie de liquidités causée par l’incidence économique de la flambée actuelle de coronavirus, qui aggrave leurs difficultés d’accès au financement par rapport aux moyennes et aux grandes entreprises. Si aucune mesure n’est prise, ces difficultés pourraient entraîner un grand nombre de faillites de micro et petites entreprises, causant de graves perturbations pour l’ensemble de l’économie de l’UE. Le 12 juin 2020, la Commission a par conséquent lancé une consultation auprès des États membres sur la possibilité de fournir un soutien public au titre de l’encadrement temporaire à certaines micro et petites entreprises, même si elles sont considérées comme étant en difficulté financière au 31 décembre 2019.

Deuxièmement, la Commission a consulté les États membres sur une éventuelle modification du règlement général d’exemption par catégorie et de certaines lignes directrices en matière d’aides d’État en vue de lever l’exclusion des entreprises en difficulté en tant que bénéficiaires d’aides en application de ces instruments pour la période comprise entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021.

Troisièmement, la Commission procède à un bilan de qualité, qui doit être finalisé au cours du deuxième semestre de 2020, en vue d’évaluer les règles actuelles, y compris la notion d’«entreprise en difficulté», et de déterminer si un réexamen est nécessaire. 

MON COMMENTAIRE SUITE A LA RÉPONSE DE LA COMMISSION :

« Alors que la crise économique touche de plein fouet l’ensemble de l’économie et notamment les entreprises françaises depuis plusieurs mois, la Commission a décidé de lancer une « consultation » le 12 juin seulement pour étudier la possibilité d’aider les entreprises considérées comme étant en difficulté au regard de la définition retenue par l’UE. Ce manque de réactivité aura très certainement des conséquences graves sur les entreprises qui ne peuvent malheureusement pas se permettre le luxe d’attendre autant un accès aux aides et seront contraintes de fermer définitivement leurs portes.«