Commentaire de Mme Joëlle Mélin

Procédure transfrontalière d’insolvabilité

J’avais interrogé la Commission sur-le-champ d’application d’un nouveau règlement en matière de procédure d’insolvabilité transfrontalière. À cette question pointue, la réponse de la Commissaire fut obscure et compliquée et il ressort que l’Union se défausse de ses obligations sur la Cour de justice de l’Union européenne qui n’a pourtant pas vocation à légiférer dans les domaines d’imprécisions règlementaires. Dès lors, à l’abondance des textes européens, s’ajoute les imprécisions juridiques : bonjour les dégâts…

 

Question de Mme Joëlle Mélin

Le nouveau règlement (UE) 2015/848 entrera en vigueur, sauf circonstances exceptionnelles, au 26 juin 2017. Or, différentes questions demeurent en suspens. Concernant le champ d’application géographique dudit règlement, la délimitation de ce dernier est imprécise dans la mesure où il n’existe pas de définition de ce qu’est la procédure transfrontalière. Aussi, il est difficile de déterminer quelle procédure transfrontalière entre dans le champ d’application du présent règlement. De la même manière, en matière de compétence juridictionnelle, on ne trouvait pas dans le règlement (CE) no 2000/1346 de principe d’unicité procédurale permettant au tribunal ayant ouvert la procédure de connaître toutes les affaires connexes ou annexes. Or, si le nouveau règlement a réglé ce problème, il n’a pas clairement défini la notion de l’action annexe. De la même manière, des incertitudes existent quant au domaine des dispositions relatives aux actions annexes et leur application dans le cadre d’une procédure secondaire et quant au fait de savoir si cette dernière doit se rattacher à la procédure principale.

Aussi, nous aimerions poser les questions suivantes:

  • Quelle définition la Commission retient-elle de la notion de «procédure transfrontalière» ?
  • D’autre part, quelle définition la Commission retient-elle de «l’action annexe» ?
  • La juridiction de l’État d’ouverture de la procédure secondaire est-elle exclusive ou alternative ?

Réponse donnée par Mme Jourová au nom de la Commission

Même si la notion de «procédure transfrontière» n’est pas définie dans le règlement (UE) 2015/848 relatif aux procédures d’insolvabilité, la portée territoriale de ses règles est claire: les règles uniformes de compétence et les règles de conflit de lois sont applicables en tout cas où une demande d’ouverture de procédure est déposée auprès d’une juridiction d’un État membre. Les règles sur la reconnaissance et l’exécution s’appliquent lorsqu’une décision rendue dans un État membre doit être reconnue ou exécutée dans un autre. Les règles sur la coopération et la communication s’appliquent lorsque des procédures d’insolvabilité parallèles sont en cours dans plusieurs États membres. Les règles sur l’interconnexion des registres d’insolvabilité s’appliquent lorsque des procédures d’insolvabilité engagées dans un État membre doivent être inscrites au registre national.

Aucune définition spécifique du terme «action connexe à la procédure d’insolvabilité» n’est établie dans le règlement cité, mais son considérant 35 fournit des orientations à ce propos. En outre, les tribunaux peuvent s’appuyer sur l’abondante jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne en la matière.

L’État qui ouvre une procédure secondaire est le seul compétent concernant cette procédure. Les effets d’une procédure secondaire sont cependant limités aux avoirs du débiteur situés sur le territoire de l’État qui a ouvert cette procédure. Jusqu’au dépôt d’une demande d’ouverture d’une procédure secondaire auprès d’une juridiction de l’État où le débiteur possède un établissement, la compétence de l’État membre où s’ouvre la procédure principale concernant ce débiteur couvre également les avoirs et affaires localisés dans l’État membre où se situe cet établissement.