Corrélation entre diminution de la durée d’indemnisation du chômage et augmentation de la pauvreté en Europe

Commentaire de Mme Joëlle MÉLIN

La Commission crée le concept d’une « durée raisonnable » d’indemnisation du chômage sans imposer de minimum et témoigne ainsi de sa méconnaissance manifeste de la situation des chômeurs !

Question de Mme Joëlle MÉLIN

Selon les derniers chiffres publiés par l’Office européen de la statistique, la part des travailleurs pauvres au sein de la zone euro est passée de 7,3 % en 2006 à 9,5 % en 2016. De la même manière, au sein de l’Europe des 28, ce taux est passé de 8,3 % en 2010 à 9,6 % en 2016. Force est de constater que les mesures d’austérité ont fortement contribué à cet appauvrissement du monde du travail.

Ces chiffres témoignent de l’échec de la stratégie Europe 2020 dont l’objectif est la réduction du nombre de personnes confrontées au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale. Force est de constater que le «modèle» allemand consistant à réduire la période d’indemnisation du chômage, conformément aux souhaits de la Commission dans ses recommandations aux États membres, a eu pour conséquence de faire de l’Allemagne un des pays présentant l’un des taux de travailleurs pauvres les plus élevés d’Europe, avec 22,5 % contre 8,8 % en France, quand la moyenne européenne est de 17,4 %.

Aussi, nous souhaitons savoir si la Commission, eu égard à ces chiffres alarmants, va revoir ses recommandations et cesser de prôner une réduction de la durée d’indemnisation du chômage dans les pays membres.

Réponse donnée par Mme Thyssen au nom de la Commission

Si la part de la population exposée au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale a diminué dans la plupart des États membres en 2016, le risque de pauvreté au travail a continué de croître (et au-dessus du niveau d’avant la crise de 8,3 % en 2007) pour s’élever à 9,6 % de la population en âge de travailler de l’UE en 2016. Cela reflète des divergences entre les caractéristiques du marché du travail portant sur la prévalence du travail à temps partiel et/ou temporaire, les niveaux de salaire et l’intensité du travail dans les ménages.

Les allocations de chômage fournissent aux personnes et aux ménages un filet de sécurité essentiel et contribuent à les protéger contre la pauvreté. Elles varient considérablement entre les États membres, elles fonctionnent dans un cadre économique et institutionnel plus large et leur structure demeure de la responsabilité des États membres.

Comme le reconnaît le principe 13 du socle européen des droits sociaux, les chômeurs ont le droit à des prestations de chômage adéquates pendant une durée raisonnable, en fonction de leurs cotisations et des règles nationales d’admissibilité. Ces prestations ne doivent pas avoir d’effet dissuasif par rapport à un retour rapide à l’emploi. Les chômeurs ont également droit à un soutien à l’activation adéquat de la part des services publics de l’emploi pour leur (ré)insertion sur le marché du travail.

La Commission assure le suivi de tous ces aspects, y compris des systèmes de prestations de chômage, dans le contexte du Semestre européen et aussi grâce à un cadre d’évaluation comparative spécifique. Sur cette base, des conseils stratégiques peuvent être adressés aux États membres au moyen de recommandations par pays, afin d’atteindre les objectifs du socle européen des droits sociaux.