Question du Dr Joëlle MÉLIN

D’après une récente étude de la commission Agriculture et alimentation du réseau d’organisations non gouvernementales «Coordination SUD», il ressort que la politique agricole commune (PAC) contrevient aux engagements de l’Union européenne en ce qui concerne la cohérence des politiques avec les objectifs de la coopération au développement ainsi qu’en matière de respect des droits humains. En effet, elle affecterait les paysanneries du Sud dans plusieurs domaines. Tout d’abord, les paiements directs entraînent une baisse des prix et contribuent ainsi à accentuer la concurrence des importations d’origine européenne sur les marchés des pays du Sud et à freiner le développement de filières de commercialisation des produits locaux. De plus, le budget de la PAC, en privilégiant les paiements à la surface, avec peu d’exigences environnementales, stimule une production agricole intensive qui entraîne, en Amérique du Sud, l’expansion d’un modèle de culture qui favorise notamment la déforestation massive.

Aussi souhaitons-nous savoir si la Commission entend se saisir de ce problème pour revenir sur le mécanisme des paiements directs du premier «pilier» de la PAC afin que les conditions environnementales de l’attribution de ces aides favorisent les petits producteurs et non les multinationales pratiquant une agriculture intensive à l’origine des conséquences évoquées.

Réponse donnée par Mr Wojciechowski au nom de la Commission

Grâce à ses réformes successives, la politique agricole commune (PAC) a renforcé son orientation vers le marché en réduisant au minimum les mesures ayant des effets de distorsion de la production et des échanges. Aujourd’hui, les paiements directs, qui soutiennent les revenus agricoles, sont, dans la plupart des cas, découplés de la production de produits agricoles spécifiques, ce qui permet aux agriculteurs de prendre des décisions liées à la production en fonction des signaux du marché. Les propositions de la Commission de 2018 portant sur la PAC au-delà de 2020 poursuivent dans cette voie. Les paiements directs demeurent largement découplés, mais sont associés à des mécanismes qui visent à une répartition plus équitable afin de prendre en considération les exploitations agricoles petites et moyennes. Un engagement résolu a en outre été pris concernant une action renforcée en faveur de l’environnement et du climat grâce à une nouvelle architecture écologique de la PAC, qui soutient les pratiques bénéfiques dans le cadre des paiements directs ainsi que de la politique de développement rural.

Les exportations de produits agroalimentaires européens vers les marchés des pays en développement répondent souvent à une demande qui ne peut être entièrement satisfaite par la production locale. L’UE aide en outre à pallier les insuffisances qui entravent le développement de l’agriculture dans ces pays grâce à l’aide au développement et à la promotion d’investissements responsables du secteur privé. Dans le cadre de sa politique commerciale, l’UE offre des conditions d’échange favorables aux pays en développement. L’UE accorde un accès à son marché en franchise douanière et hors quota à tous les pays les moins avancés (PMA) et octroie des concessions unilatérales aux pays en développement. Les accords de partenariat économique conclus avec les pays en développement ont été soigneusement conçus pour permettre aux pays partenaires de protéger leurs productions agricoles sensibles de la libéralisation, soit en les excluant du champ d’application de la libéralisation, soit en permettant le déclenchement de garanties solides en cas d’augmentation soudaine des importations.

MON COMMENTAIRE SUITE A LA RÉPONSE DE LA COMMISSION :

« Dans sa réponse, la Commission européenne affirme que « les exportations de produits agroalimentaires européens vers les marchés des pays en développement répondent souvent à une demande qui ne peut être entièrement satisfaite par la production locale ». Et pourtant, force est de constater que les différentes études démontrent le contraire et les exportations viennent souvent compléter une offre locale surabondante conduisant les locaux à développer une agriculture plus concurrentielle aux conséquences pour l’environnement plus que néfastes. Il est urgent de prendre en compte ces différentes études dans les différents textes de révisions de la PAC ».