Protection des travailleurs contre les agents cancérigènes, acte 1

Projet d’avis du Dr Joëlle MÉLIN

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  • Justificatif du rôle de l’Union européenne

La proposition de directive du Parlement Européen et du Conseil visant à modifier la directive 2004/37/CE est une nécessité, même pour les tenants de la subsidiarité en matière de protection sociale. En l’occurrence, il s’agit de la protection des travailleurs contre les risques des produits cancérigènes et mutagènes.

Selon nous, des conventions internationales ou autres voies auraient parfaitement pu tenir le rôle que la directive suscitée entend jouer.

Mais il est clair qu’il y a urgence, la mobilité des travailleurs dans les différents pays membres les soumet, pour un métier donné et une exposition donnée, à des réglementations parfois incohérentes. Il est donc de l’intérêt de tous, employé, employeur, État garant de son système de protection sociale, que des recommandations conformes aux « données modernes et éclairées de la science » soient partagées par tous au plus tôt.

  • Justificatif de la prudence nécessaire en la matière

Une directive en la matière ne doit pas être contraignante, ni ne doit imposer des délais trop courts. Elle ne doit être qu’une incitation permettant aux entreprises de se mettre aux normes aussi vite que possible, mais en tenant compte malgré tout de la réalité économique de chaque pays membre. De la même façon, il n’est pas possible d’imposer des normes coercitives en l’absence d’études précises et validées par le plus grand nombre.

Mais a contrario, la particularité du domaine des maladies professionnelles est l’extrême délai entre l’exposition par inhalation ou tout autre contact à une substance cancérigène ou mutagène et le diagnostic incontestable de la maladie, entre 10 à 40 ans. Dès lors, la dernière directive datant de 2004, il y a urgence à réviser la liste des agents toxiques et les taux d’exposition. De plus, les années 1970 ont vu un plein essor des activités minières, métallurgiques et industrielles : il y a donc eu un très grand nombre de travailleurs – et indirectement leur famille – exposés à de nombreux agents. Se pose d’ailleurs en complément la notion de pathologies cancéreuses multi-agents, qui commence déjà à compliquer les législations.

  • Justificatif d’une stratégie

Dès lors, l’harmonisation, dont le seul but est l’application du principe de précaution devrait logiquement et efficacement, passer par différentes actions successives :

  1. La détermination par les États membres, des substances ou des groupes de substances, en relation directe et certaine avec une pathologie cancéreuse.
  2. L’établissement de la liste des travaux exposant à l’inhalation ou toute autre forme de contact avec la substance.
  3. La durée d’exposition minimale au produit et les délais d’apparition de la maladie professionnelle.
  4. Les taux maximum d’exposition.

Cela est déjà très largement codifié dans le droit des maladies professionnelles reconnues en France. Il s’agit de tableaux très complets qui mériteront d’être une des bases techniques d’harmonisation des préconisations adoptées par chaque État membre, si ces derniers ne sont pas déjà dotés d’un outil équivalent.

  • Justificatif de la rédaction du présent rapport

C’est pourquoi le rapporteur inclut bien volontiers dans son rapport les nouvelles substances dont les études croisées ont déterminé leurs pouvoirs cancérigènes et aussi les taux évalués ou réévalués de toxicité à court, moyen et long terme.

Mais le rapporteur y ajoute une liste de produits dont, au moins un État membre, a déterminé par voie législative ou réglementaire la responsabilité directe et certaine dans l’apparition de cancers. Le rapporteur inclut donc la notion complémentaire de surveillance, et souhaite que chaque pays membre, si cela n’est déjà fait, applique cette surveillance accrue, dans l’attente de la fixation, au niveau national, des taux maximums d’exposition.